Textes et Publications

Mon premier livre photo "Vies en villes" avec les textes de Mario Urbanet est paru aux éditions Unicité. A commander ici: https://www.editions-unicite.fr/auteurs/URBANET-Mario-et-MARC-Alice/vies-en-ville/index.php


Petits écrits sur petits riens


1km

cercle de vie éteinte

1km

cercle de mort certaine

1km

de liberté contrainte

1km

d'avenir incertain

1km

ça craint

1km

ça use

1km

cour de prison

1km

je tourne en rond

1km

ça tourne pas rond

1km

et ron et ron petit patapon

1km

disque rayé

1km

de tics et de tocs

1km

fin de partie

en attendant dodo


1km

j'irai plus haut plus loin

au-delà de ce cadre étriqué

au-delà de cette orbe muraille

au-delà de cette couronne d'épine

au-delà de la coronazone

au-delà des vagues déferlantes

au-delà des barrières de corail

au-delà de leurs épouvantails

au-delà des distances rigides

au-delà d'un cynisme frigide

caresser la beauté de la Terre

étreindre ceux qui me sont chers

avec eux

dire

rire

chanter

hurler

sauter

aimer

baiser

ramper

franchir les barbelés abstraits

au bout d'une aire dépassée

au bout d'une ère du passé

l'ancien monde convulse

monde en berne

monde en crise

monde en ruine

ce monde succombe

ils sont devenus fous

furieux

dangereux

enragés

à lier

et récusent son agonie

tiens bon et ne lâche jamais

nos rêves triompheront

et nous rebâtirons ensemble

les cathédrales boisées

de nos humaines destinées

joyeuses et libres

en un olympe étincelant

Alice Marc ©Novembre 2020 (confinement)

Amazonia

Brûle brûle brûle

forêt ancestrale

forêt magistrale

forêt primordiale

mon cœur serré s'enflamme

asséchant mes sanglots

du funeste complot 

intarissables larmes

faites de fiel et de sang

sous un ciel impuissant

du désastre accablant

du silence mugissant

du peu de drame en fait

l'odeur de chair brûlée

de mes frères sacrifiés

pénètre les ténèbres

profondes et ardentes

de ma désillusion

Terre à terre à genou

aux entrailles béantes

à jamais endeuillée

berceau de toute vie

envolée en fumée

noircie par la laideur

absolue et aveugle

les singes hurleurs crient

la douleur du monde

le barbecue géant

a déjà commencé

jaguar boucané

puma carbonara

tatou à tout va

brochettes d'agouti

flambée de colibris

civet de vampire

rôti de tapir 

capucin à la braise

fondue de fromager

carte de mon dégoût

je regarde vomir

les dieux et les cieux

de tant de cruauté

de la terreur de ceux

prisonniers de ce feu

des manguiers innocents

des figuiers embrasés

animaux calcinés

peuples déracinés

bûcher des vanités

s'acharnant sur ses proies

agonie programmée

l'Amazonie se noie

sous les ardentes nuées

et les cendres de bois

convulsions insensées 

du despotique Marché


@ Alice Marc 2019




jusqu'à la fin des jours 

Dans les ornières du temps engluées

les fleurs sauvages louvoient au vent mauvais

de l'ineffable colère aux cieux déchaînés

affres d'abysses abîmées

amères rimes écorchées

de la beauté et du désastre

qui triompha de l'arrogante humanité

affairée à briser toute vie

aveuglée par trop de vanité

énucléé formatée

vidée d'encombrante pensée

ravages d'une Terre

exsangue et accablée

l'ultime déchirement de la nuit éternelle

terrassa les diaboliques âmes en peine

d'un illusoire dessein

gorgées de désir

mortifère et funeste

anthropocène accompli

exit la maligne ennemie

sixième extinction

totale

finale

fin


nuit

immense

silence


aurore natale

calme fracassant

d'une furtive nature

mycelium  racines

secrets réseaux de l'ombre

épiant patiemment

l'heure de la résurgence

un sublime végétal

recouvra son essence première

divine incarnation

forces vives

arrimées et armées

sanguines ou blêmies

au souffle crépusculaire

d'une ère printanière

célébrant la florale virginité

d'une nature insurgée

de ses persécuteurs délestée

voraces auto-phages

à l'aube de l'azur

libres semences

poussières fertiles

d'étoiles lointaines

voleront au gré

des soupirs

chauds et moites

d'un air lourd si léger

tiges et pistils érigés

tendres pétales dorés

herbes folles parfaites

mousses vertes et moelleuses

glorieuses fleurs rebelles

indociles fougères

discrètes beautés des prés

iront sans crainte tapisser

le sol d'un monde nouveau

d'anarchiques prairies

du linceul délivré

au soleil tiédi

et dureront encore

jusqu'à la fin des jours


Alice Marc@ 2019



Funambule

Je suis un funambule, en équilibre sur le fil ténu de la vie qui vacille et se dérobe,
qui avance avec douceur, d'un pas souple et léger.
Avec patience et intelligence, le funambule se meut dans cet espace-temps labile et incertain.
Avec délicatesse, il chemine au rythme de l'autre et à sa hauteur.
Avec humilité, il guide et est guidé en retour.
Avec pudeur, il répand et accueille.
Avec tact et mesure, il avance ou recule au gré du vent et de la lueur, au fil du temps.
Tous sens en éveil, il sent et ressent.
Il use de son corps, de son cœur, de son âme pour créer un possible qui se dilue.
Il progresse sur un océan protéiforme et profond.
Sur son fil, il tient bon. Malgré le vide, il a confiance, il fait confiance.
Il progresse lentement mais sûrement sur la voie ténue et immense qui s'offre à lui.
Celle de l'incertitude et de la rencontre. Celle du mystère. Celle de l'inachevé.
Celle du partage.
Il penche, plie, se relève, il tient la barre pour donner sens.
Il s'éloigne ou se rapproche, se fond et occupe la place laissée.
Il accepte, laisse aller, sans résister, glisse et fait glisser.
Convoqué par son prochain dans l'ici et maintenant,
comme ultime garant d'un avenir indécis, il va et vient,
mène la danse telle une sarabande,
entraînant la vie vers l' autre rive, inconnue et sereine.
Il fait au mieux, avec ce qu'il est, dans ce ballet improvisé toujours recommencé.
L'acrobate marche avec, mais sans filet.
Il aime, il rit, il vit.

Alice Marc © 2018



Etats d'urgences (à propos de la série photo)

Hier j'étais la Fée, poupée idolâtrée

Idéale plastic girl, la beauté fantasmée

Rêves de féminité en moi si incarnés,

Le pouvoir du paraître, le désir d'être aimée.

Déesse imaginaire, n'étais-je donc qu'un mirage,

Triomphante éphémère du luxe et de l'image,

Objet de convoitise, on voulait m'acheter,

Me posséder toujours, en moi se projeter.

Triomphe du simulacre, de la futilité,

De l'irréalité de mon corps réifié

Ma chute en est plus rude, dans ce monde effondré,

Où chaos succéda à la frivolité.

Me voilà solitaire, aliénée et errante

Traquée par le passé, fugace figurante

Livrée aux éléments à leur tour déchainés

Une ombre de moi même sur une Terre dévastée.

Dénudée par le temps, pure victime du trop,

Du massacre des hommes, des violences au galop,

Poupée désenchantée, fruit de putréfaction

Déchet d'un monde blasé, voué à l'extinction.


Alice Marc © 2016



Survivante

Je suis née Humaine, Enfant de la Terre, minuscule et splendide pépinière de vie gravitant au Soleil, battant au cœur de l'Univers. Poussière de bonne étoile, guidée par la lumière.

​De l'Amour de deux Humains, espèce vivante, parmi tant d'autres, prédatrice, à l'intelligence diabolique et aux désirs chimériques. Capable du meilleur comme du pire.

De l'unisson de deux êtres, beaux, aimants et généreux, mes parents, nés de contrées différentes, de cultures différentes. Père enraciné en Haute Marne, mère déracinée d'Algérie. Deux pôles opposés qui se sont attirés et ont osé la fusion de leurs âmes et de leurs chairs. Une prolongation momentanée de leur amour à travers ma présence, et celle de mon frère, premier né.

​J'ai grandi ainsi, entre deux humains, singuliers et semblables, le yin et le yang. Entre constance et incertitude, entre terre et feu, entre calme et orage, entre force et fragilité.

Jusqu'à ce jour... Où une sombre solitude s'invita en moi.

​La Nature, ayant un suprême pouvoir sur les Humains, puisqu'elle les a enfantés, celui de vie ou de mort, décida brusquement de reprendre mon père, tôt dans ma vie toute neuve, sous mes yeux sidérés.

​Je suis survivante.

​J'ai grandi ainsi, entre Paris et Auberive. Entre gris du bitume et vert des herbes folles, entre barres arides et forêts opulentes, entre caniveaux ruisselants et méandres de l'Aube, entre étroitesse des murs et espace infini, entre odeurs de la ville et parfums de l'humus. Deux univers parallèles, à leur manière si poétiques. Entre rêve et réalité.

J'éprouve en ce pays de Haute-Marne comme un intense sentiment de vie, de liberté, de plénitude et de confiance à nul autre pareil. De joie simple, par ma communion à la Nature.

Arbres de vie, fécondes vallées , frais ruisseaux, brumes matinales, orchidées colorées, mélodie des pinsons ré-enchantent ma vie telle une poésie, toujours recommencée.

Je suis la Nature, le jour et la nuit, le silence et le bruit, le ciel et la terre, le soleil et la pluie, la couleur et le noir, je suis la vie.

J'ai reçu en héritage un amour inconditionnel, et grâce à cet amour, suis devenue femme puis mère, capable de transmettre à mon tour cette force de vie, de survie et d'amour.

​Animée par les forces du beau et du bien, je suis venue au monde pour accomplir ma destinée avant de disparaître: prendre soin de mes frères et du vivant. Soulager les douleurs, accompagner la vie, dans le respect et la douceur, apprivoiser la mort.

La Terre est ma Mère, certains l'ont oublié, égoïstes pécheurs, prêts à hypothéquer l'avenir de leurs propres enfants.

Le monde qui m'a vue naître est en perdition, la Nature en grand danger et mon espèce à présent menacée d'extinction.

Ma colère est grande contre les forces obscures, s'acharnant à détruire la vie. Contre la vanité et l'illusoire suprématie de quelques hommes. Contre leur rêve d'immortalité et de toute puissance. Contre leur avide soif de pouvoir et de l'argent. La Nature est notre seule richesse.

​Puisant mes forces de vie dans l'amour des miens, les bienfaits de la musique et la contemplation de la beauté du monde, mes yeux fertiles figent en lumière l'évanescence de la vie, du temps qui inexorablement s'évanouit, témoignant de la fragile et forte grâce de la Nature, de la condition humaine, mais aussi de sa tragédie qui se joue devant moi, sa finitude.

​Naissance et mort sont la vie.

​Je suis humaine, et mortelle, comme tous les miens...La Nature, elle, survivra.

Alice Marc © 2016 (texte écrit pour la série "Survivants" exposée à La Maison Laurentine)





MOI MOI MOI MOI sur une Image d'Alice Marc (série "Survivants")

par Mario URBANET, Écrivain, Poète, conteur


Semblable au duvet d'un ventre soyeux

sous le souffle d'un amant

l'herbe folle ondule à la caresse du vent


venu de loin le vent

a tout emporté dans une frénésie têtue

la retenue n'est pas éternelle

tant et tant de temps à chasser des nuages

somme toute ordinaires


cette fois c'est le nuage qui compte

qui marque le tournant définitif

de l'histoire des homoncules

ceux-là qui se croyaient !


le chemineau du temps qui passe

revêtu d'une dérisoire et risible carapace

croit encore à la fuite en avant


difficile d'y reconnaître

l'être qui régna sans partage

sur toutes les espèces

les asservit et les força à sa merci


cet exemplaire est-il le seul qui subsiste !

l'ultime témoin

il campione ?


découvrira-t-il la faille

le moment clé où le sapiens a bifurqué

où il a confondu progrès et suicide programmé !

un brin de jugeote lui viendra-t-il enfin...


ah ! si c'était à refaire ...

mais l'homme l'a si souvent répété :

que voulez-vous ! on ne se refait pas !

© Mario Urbanet

https://www.mario.urbanet.sitew.com/#Presentation.A




IN FINE, série photographique

"Les fragiles"

Les corps se déforment, les dos se voûtent, les mains tremblent, les pieds s'emmêlent, les chairs tombent, les âmes saignent et se blottissent, les plaies suintent, les souvenirs s'évaporent, les rêves dansent, les désirs s'éclipsent, le temps se perd, les paroles s'envolent, les pensées se brisent, les portes claquent, les murs s'écaillent, les regards brillent, les cris s'égarent, les silences en disent long, les rires s'évanouissent, les bouches embrassent, les bras enlacent, les esprits s'embrouillent, les ombres se croisent. 

La vie est partout, la vie est nulle part, improbable et permanente. La mort est partout, la mort est nulle part, probable et impermanente. 

Le vide les aspire mollement telle une insatiable machine à dévorer le temps. 

Les fragiles ne savent plus mais savent bien, scrutent ou ignorent, demandent ou se taisent, marchent ou se figent, veulent ou renoncent, s'ouvrent ou se ferment, dansent et oublient les pas. Ils sont ici ou ailleurs, sur leur radeau qui tangue et les mènent doucement, brusquement, inexorablement. 

Confiants et inquiets, ils glissent, ils chavirent, ils résistent, ils vivent. Vagues à l'âme, bleus au cœurs, cuirs tannés, sourires tendres, visages creux, ils sont beaux, ils sont laids, ils sont nous, ils sont eux, ils sont la mémoire et l'oubli, ils sont le monde."

© Alice Marc

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